Lettre ouverte au ministre des Finances

Par JEAN-FRANCOIS LECKNING

Monsieur le ministre Padayachy,

Je vous remercie d’avoir pris le soin de retourner mon appel la semaine dernière, quelques heures avant que vous n’énonciez les mesures d’aides visant à accompagner les PME par ces temps de crise. Ce jour-là, je vous avais expliqué qu’il était essentiel de prendre en considération, au préalable, la réalité des milliers de petites et micro-entreprises. Vous m’avez écouté, certes, mais je ne suis pas sûr que vous m’ayez vraiment entendu.

Aussi, je me permets d’insister sur ce point : l’accompagnement que propose l’Etat n’est pas du tout adapté à nos besoins, mais davantage à ceux des grosses PME qui monopolisent l’association censée nous représenter. Association qui, je l’ai appris, vous a soumis l’essentiel des propositions que votre gouvernement a adoptées.

Je ne m’épancherai pas ici sur toutes ces mesures, mais seulement sur deux d’entre elles :

1) Vous avez annoncé un moratoire de six mois sur le remboursement des emprunts d’entreprises. Or, tout le monde sait que les banques commerciales n’accordent pas d’emprunts, faute de garanties, aux petites et aux micros entreprises qui se battent pour survivre. En revanche, elles nous prêtent volontiers en tant qu’individus, en prenant le soin d’hypothèquer nos biens. Du coup, pour nous, le problème reste entier : nous devons continuer à rembourser alors que nous ne pouvons plus générer de revenus !

2) Vous nous proposez, par ailleurs, de nous endetter davantage en contractant, auprès de la DBM, un prêt allant jusqu’à Rs 1 million, mais remboursable sur seulement deux ans à 6.5% d’intérêts pour les quinze derniers mois. Ce qui ferait une mensualité de près de Rs 40 000, soit un montant parfois supérieur aux salaires de beaucoup de petits entrepreneurs. C’est surréaliste et indécent monsieur le ministre !

J’ai donc pris sur moi pour mettre en ligne dimanche une pétition visant à réunir 4,000 petits entrepreneurs qui ne savent plus vers qui se tourner pour trouver de l’aide. Ensemble, nous avons préalablement énuméré une série de mesures qui nous soulageraient.

A l’heure où je vous adresse ce courriel, je suis heureux de vous annoncer que 4,200 petits entrepreneurs ont signé cette pétition. L’objectif est donc atteint. Nous devrions, sans problème, passer la barre des 5,000 signatures d’ici vendredi.

Ci-joint vous trouverez : 1) la liste complète des signataires, 2) les commentaires laissés par certains d’entre eux, mais, plus important, 3) les sept mesures que nous vous invitons à considérer en urgence et qui ont déjà été adoptées dans d’autres pays.

C’est un appel du cœur. Votre devoir, en tant que ministre des Finances, est de considérer l’ensemble des acteurs de l’économie mauricienne. Pas seulement les mieux lotis. La contribution des micro-entrepreneurs et des petits entrepreneurs ne se mesure pas. Mais elle est palpable. Il serait surréaliste que votre gouvernement nous laisse tomber aujourd’hui. Vous êtes mieux placés que moi pour en mesurer les conséquences.

Avec Béatrice Bijou-Bellepeau, Jean-Max Appanah et Jenna d’Hotman, petits entrepreneurs en difficulté comme moi, nous souhaiterions vous rencontrer très rapidement pour en discuter davantage, à l’heure et au lieu qui vous conviennent. Nous parlerons, évidemment, au nom des 4,200 personnes qui ont signé cette pétition.

J’attends votre retour, que j’espère rapide.

Je vous prie de croire, monsieur le ministre, en l’expression de mes meilleurs sentiments.

Bien à vous.

Jean-François LECKNING