CLAREL MICHAUD
Self-made man !
Clarel Michaud, CEO de MC Easy Freight, entreprise engagée dans la logistique et le fret, est un self-made man accompli. Celui qui, avec son partenaire, Marino Martin, a fondé la compagnie il y a dix-neuf ans avec un capital de seulement vingt-cinq mille roupies, brasse aujourd’hui des millions en chiffres d’affaires. Sa détermination et son énergie débordantes l’ont aidé à se faire un nom dans le secteur international du fret.
Propos recueillis par : Mireille MARTIN – Photos : Jean-François LECKNING
SON PARCOURS : J’ai grandi à Port-Louis, dans le Ward IV, parmi une fratrie de six enfants. Devenu orphelin de père très jeune, j’ai pu compter sur ma mère, Nicole, qui m’a toujours soutenu pour les petites comme pour les grandes choses de la vie. Après un bref parcours de journaliste stagiaire, j’ai été tour à tour agent comptable, puis employé d’une entreprise de fret. En 2000, avec mon partenaire, Marino Martin, nous avons créé MC Easy Freight. Le capital de départ était de Rs 25,000 ! Le grand tournant de la boîte fut la reprise des activités de la filiale mauricienne d’Expeditors, une multinationale de fret américaine cotée à la bourse de New York. Ce défi, que nous avons su relever, nous permet aujourd’hui d’avoir des ouvertures sur l’international. MC Easy Freight compte une soixantaine d’employés, incluant ceux de notre filiale de Madagascar. Et dans le but d’accroître notre visibilité, nous avons cédé en 2017 une partie de nos actions à un grand groupe de presse, La Sentinelle Ltée. Fort de ce soutien, 2018 et 2019 ont été de bonnes années.
SA DEVISE : J’en ai quelques-unes : réactivité, résistance et résilience devant l’adversité ! Cela décrit bien mon petit côte vietnamien, un peuple qui force l’admiration. Ce sont des qualités indispensables pour survivre dans le monde des affaires, surtout quand on a la responsabilité de familles entières. Dans mon domaine, comprendre et répondre rapidement aux besoins des clients aide à se démarquer. Je ne prends jamais rien pour acquis et je cherche toujours à améliorer les prestations de l’entreprise. Et cela rejoint aussi cette citation de Nelson Mandela : “The greatest glory in living lies not in never falling but in rising everytime we fall.” Le monde est cruel et il faut se battre sans arrêt pour survivre. Je pense toujours au bien de mes employés à chaque fois que j’affronte un nouvel obstacle.
SA MÉTHODE : Croire en ce que l’on fait et le faire d’une manière organisée afin de viser le meilleur. Nous avons travaillé très dur, mon partenaire et moi, pour arriver là où l’on voulait. Rien ne s’obtient, même dans les petites choses, si un travail en amont ne se fait. Tout réside dans le ‘home work’ comme j’aime si bien le dire.
SES VALEURS : L’honnêteté, le respect de l’autre… Autant de valeurs importantes à mes yeux, mais qui se perdent malheureusement de nos jours. Nous vivons dans un monde où on cherche à exploiter l’autre en pensant qu’il est naïf. Autre valeur : la passion, c’est la clé de la réussite. Je suis passionné et curieux dans tout ce que j’entreprends. J’ajouterai aussi le sens de la mesure, particulièrement dans les propos que l’on tient. On peut être franc et honnête sans pour autant blesser l’autre.
SES FORCES : J’ai un esprit combattif. Quelle que soit la cause, peu importe le but final, l’investissement de ma personne dépasse les barrières et j’y prends plaisir. Je jette rarement les armes. J’ai tendance à m’investir à cent pour cent. Mais tout ce que je fais, je le fais parce que j’aime. Je ne me force à rien.
SES FAIBLESSES : Ma naïveté, peut-être ? Je crois trop souvent au Père Noël. Je suis de ceux qui pensent que la confiance s’établit au premier contact. J’ai tendance à m’ouvrir trop rapidement et il arrive que je sois déçu. Tout le monde n’est pas honnête. Cela dit, on ne doit pas non plus attendre des années avant de faire confiance à quelqu’un.
SA FIERTÉ : (Sans hésitation) Ma maman, Nicole, aujourd’hui âgée de 82 ans et grâce à qui j’ai fait autant de chemins ! Mon papa, Serge, qui m’a laissé un peu de lui avant de partir. Je suis fier de voir mes trois enfants – Cédric, Céréna et Camille – s’épanouir. De voir mes employés avancer dans leurs vies, être heureux. Je suis fier de tout ce que j’ai pu accomplir.
SES REGRETS : A quinze ans, j’ai perdu mon père. Aujourd’hui, à 50, je ressens cruellement son absence. Je n’ai jamais su ce que c’était que d’avoir un père à qui se confier. Cela me manque de ne pouvoir prendre un pot avec lui, échanger. Plus les années avancent, plus je ressens son absence. Quelque part, je regrette de ne pas avoir eu droit à une adolescence insouciante, ayant eu à prendre des responsabilités trop tôt. A 15 ans, j’étais déjà le poteau de la famille.
SON RÊVE : Voir mes enfants devenir des adultes. Qu’ils terminent leurs études, deviennent autonomes et surtout qu’ils soient heureux dans la vie et qu’ils vivent de leur passion. Mon rêve c’est aussi de voir MC Easy Freight résister à l’épreuve des années, me survivre et aller plus loin encore. Nous fêterons nos vingt ans l’année prochaine. Plus qu’un business dans lequel j’ai investi, c’est une partie de moi. Le lien affectif est très fort.
SON DÉFI : Donner les moyens à MC Easy Freight de rester compétitif. Il faut donc être interactif, toujours réagir et innover selon la tendance du marché. Nous évoluons dans un secteur d’activités où beaucoup de facteurs externes peuvent jouer contre nous. Il faut prendre le risque de se remettre en question, parfois même de se réinventer. C’est un défi permanent.
SON INSPIRATION : Nelson Mandela m’inspire énormément. Je lui voue une grande admiration. Ce qu’il a réalisé en Afrique du Sud est tout simplement extraordinaire.
SON BRAS DROIT : J’ai plusieurs mains droites. Et des mains gauches aussi. Dans les affaires, on en a besoin. Il faut accorder de la valeur et tirer profit des conseils ou des suggestions des autres. Il arrive parfois que mon chauffeur, Ismaël, me donne de bonnes idées quand nous discutons durant un trajet.
UN OBJET DANS SON BUREAU : Venez voir… (Il se lève. L’œil pétillant comme un enfant qui montre les jouets qu’il a reçu pour Noël, il nous montre un mini-buste de Nelson Mandela et une collection de mini-personnages de la série Tintin). Cette collection, un de mes frères me l’a donnée. Ce sont les mêmes effigies qu’on a utilisé pour faire le film d’animation. Je suis un grand fan de Tintin. J’aime beaucoup ce personnage et je prends plaisir à le regarder quand j’arrive au bureau. Dans mon cœur, je reste un enfant.