JOSHILA DHABY
Libre !

C’est une artiste comme on les aime. Anticonformiste, spontanée, surprenante, mais toujours souriante. Une jeune mère de trois enfants, étonnamment douée, et qui éveille nos consciences à coups de pinceaux. Ou plutôt de fresques murales parfois surdimensionnées. Elle, c’est Joshila Dhaby, assistante de protocole à l’ambassade américaine de jour, mais ambassadrice de couleurs et d’émotions le reste du temps.

Propos recueillis par Jean-François LECKNING

“Le geste spontané de l’artiste est souvent l’expression de son désir essentiel, de sa pulsion graphique.”
“Qu’il soit petit, haut, en pierre ou crépi, le mur est le principal support et compagnon de mes créations. Il endure mes humeurs d’artiste.”

 

AUTODIDACTE >  Je puise mon inspiration auprès d’artistes contemporains mais aussi dans les grands classiques de l’histoire de l’art. Etrangement, la notion d’artiste autodidacte est un phénomène relativement nouveau, même si les humains font de l’art depuis la nuit des temps.

BLEU > Bleu profond, bleu ciel, bleu intense, bleu royal… Autant de nuances de bleus qui reviennent systématiquement dans chacune de mes créations. Mes bleus sont porteurs d’espoir, sont contemplatifs et incitent à la réflexion ; ils symbolisent le pouvoir de l’homme de surmonter ses défis sociaux et environnementaux.

COLLABORATION > Entre artistes, avec mon public ou avec des enfants ou des étudiants… J’aime l’idée de la création participative qui engage l’autre et permet l’enrichissement personnel et le partage d’idées.

DIALOGUE > Qu’il soit entre l’homme et son environnement, entre les institutions et leurs responsabilités respectives, le dialogue est la clé pour une meilleure compréhension de nos enjeux et de nos défis.

EPHÉMÈRE > Une année, une semaine, un jour, une seconde… Toute la beauté de l’art de rue réside dans son coté éphémère et insaisissable. Une dynamique propre au changement et au renouveau.

FAMILLE > Mes enfants, mes parents, mes proches. Autant de piliers nécessaires à mon équilibre et à mon bien-être au quotidien. L’orientation de mon travail artistique est le résultat de mon interaction quotidienne avec mes trois garçons, Vashisht, Varun et Kushal. Ils sont la force motrice de mes inspirations.

GRIBOUILLAGE > Il faut toujours un début à tout. Gribouillage d’enfants ou d’artistes confirmés, toute création commence par cette forme de graffitis libres. Ici, seule l’imagination a le pouvoir ! Mes croquis m’aident à orienter ma direction artistique et à aligner mes pensées.

HISTOIRE > Elle est synonyme de patrimoine, d’héritage ou tout simplement de témoignages que l’on veut bien transmettre. Chaque œuvre raconte une histoire, peu importe si elle s’adresse aux enfants ou aux adultes. Parfois, il m’arrive d’espérer que ceux qui voient mes créations soient aussi ceux qui racontent l’histoire, avec des perspectives différentes et des appréciations variées.

INFLUENCE > Mouvement artistique contemporain, l’art urbain puise ses influences et ses techniques dans des disciplines graphiques aussi variées que la bande dessinée ou l’affiche. Sol Lewitt, artiste américain minimaliste et conceptuel, a dit un jour : “Une idée est, en elle-même, un travail d’art ; elle peut éventuellement aboutir à une forme…”

JEUNESSE > Les jeunes représentent le futur et portent en eux les espérances de notre humanité. Nous sommes responsables des choix que nous faisons et de la Terre que nous leur laissons. La jeunesse est un élément clé dans mon travail.

KYOTO > Ville que je rêve de découvrir, tant pour sa tradition que pour sa modernité. Les arts traditionnels sont au coeur de la culture japonaise et reflètent l’état d’esprit de ceux qui les pratiquent. Comment parler de Kyoto sans évoquer son désormais célèbre protocole ? Là-bas, a été signé, en 1997, le premier accord international visant à imposer des réductions d’émissions de gaz à effet de serre par pays. Le protocole de Kyoto est le résultat de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, qui a été signée par presque toutes les nations lors de la méga-réunion de 1992, connue sous le nom de Sommet de la Terre.

LIBERTÉ > Sans doute le sentiment le plus exaltant que je ressens quand je m’abandonne à ma création. Liberté de parole, liberté d’expression, liberté d’être… C’est le droit fondamental que chacun devrait pouvoir revendiquer, sans craindre la restriction ou la censure.

MUR > Qu’il soit petit, haut, en pierre ou crépi, le mur est le principal support et compagnon de mes créations. Il accepte tout : mes couleurs, mes sprays de bombe, mes coups de pinceaux et mes humeurs d’artiste.

NATURE > Elle est belle, elle est fragile et elle est notre patrimoine commun que nous devons protéger et sauvegarder à tout prix. Aujourd’hui et demain !

OCÉAN > Mon travail évoque l’immensité de l’océan qui nous entoure, qui nous nourrit, qui nous protège, mais que nous mettons pourtant tous les jours davantage en danger. Pour quand une prise de conscience ?

POCHOIR > Outils de travail indispensables. Je les découpe, je les prépare, je les sculpte… Par couches successives, ils me permettent de partager mon imagination.

QUADRILLAGE > Une autre technique que j’emploie quand je peins sur un grand mur, surtout en collaboration avec des enfants. Qui ont souvent, par ailleurs, beaucoup de questions à me poser…

RECETTE > Pour devenir un artiste respecté, il n’existe pas de “recette miracle”. Il faut simplement beaucoup de passion, énormément de travail, de l’imagination à en revendre et aussi un zeste de chance…

SPONTANÉITÉ > Le geste spontané de l’artiste est souvent l’expression de son désir essentiel, de sa pulsion graphique. Hommage et petit clin d’œil ici à Vassily Kandinsky, Pierre Alechinsky ou encore Jean-Michel Basquiat pour leur expressionnisme.

TEMPS > Thème majeure qui préoccupe l’homme depuis l’Antiquité et qui a mené à une des théories les plus populaire de notre histoire, celle de la relativité, élaborée par Albert Einstein, et qui a complètement changé nos vies. Le temps qui passe nous renvoie à notre finitude et, comme le dit le poète Blaise Pascal, “l’homme est un point perdu entre deux infinis…”

UTOPIE > Ou la poésie de l’art. Utopie d’une ville moderne, écologique… Autant d’utopies artistiques qui, à leur manière, font évoluer nos rapports entre citoyens. L’utopie de l’art s’est formée en même temps que celle de la citoyenneté.

VISION > “L’art, c’est exprimer formellement une vision du monde”, a dit l’artiste belge Jean-Philippe Toussaint. Et les voyages sont autant d’opportunités et de cheminements spatiaux qui s’intéressent au monde qui nous entoure.

WYNWOOD > Le Wynwood Art District, à Miami, en Floride, contient des galeries d’art, des peintures murales et des collections d’’art privées. Le quartier est centré autour des Wynwood Walls, conçues en 2009 par le défunt urbaniste Tony Goldman. J’ai eu l’occasion de peindre là-bas lors du Miami Art Basel de décembre 2018. Une expérience qui m’a marquée.

XYLOGRAPHIE > C’est un technique de gravure artistique, sans doute l’ancêtre du Street Art sur bois, qui m’inspire aujourd’hui pour ma prochaine grande exposition à l’Aventure du Sucre, où toutes mes créations seront réalisées sur du bois recyclé.

YEUX > J’ai toujours autant d’émotion quand je vois le regard du public se poser sur mon travail. Qu’ils aient les yeux qui brillent, qui scintillent ou tout simplement qu’ils sourient… C’est gratifiant.

ZUT > Parce que c’est fini, le jeu est terminé…