Bernard Thomas

“Au centre de tout, il y a l’Homme !”

Bernard Thomas est aux commandes de PetroServ, une entreprise incontournable en termes d’équipements et de services variés dans le domaine du pétrole et du gaz. Derrière cet homme accompli, nous avons découvert un entrepreneur fort d’une expérience internationale et de multiples rencontres aux quatre coins de la planète. Bernard est aussi un artiste qui a fait de la photographie un autre corps de métier dans lequel il met son talent au service des autres. Mais de toutes ces casquettes, c’est celle de l’homme qu’il choisit de porter au quotidien, à travers des valeurs et un sens de l’humain qui priment dans son approche, au travail comme dans la vie.

Texte : Karine HAREL – Photos : Brady GOORAPPA

SA DEVISE. La quête de l’excellence. J’aime le travail bien fait. Je me bats contre l’à-peu-près et je n’aime pas la médiocrité. Je vais beaucoup dans le détail car c’est ainsi que l’on atteint l’excellence. C’est toujours le détail qui fera la différence.

SA MÉTHODE. Construire avec mon équipe. J’ai longtemps travaillé seul, mais je mesure aussi combien l’équipe est importante. J’avais fait, il y a quelques années, une formation qui portait sur le “savoir-faire faire”. La transmission du savoir me tient vraiment à cœur. Chaque année, nous consacrons un budget de plus en plus important à la formation. Si je veux que l’équipe travaille avec moi, autant qu’elle soit formée. J’ai dirigé un terminal gazier au sud du Bangladesh pendant deux ans. Je me suis imprégné de leur culture, j’y ai énormément appris. Mais j’ai surtout compris qu’on a beaucoup à recevoir des autres. Les compétences techniques sont toujours accessibles, mais savoir comment travailler dans une autre culture que la nôtre, savoir comment fonctionne chaque personne, cela ne s’apprend pas dans des livres. On doit s’en imprégner avant de pouvoir le transmettre. Apprendre des autres pour pouvoir distiller ensuite, c’est aussi cela ma méthode.

SES VALEURS. L’amour et l’intégrité. L’amour de soi, l’amour du prochain, l’amour du travail. L’intégrité dans tout ce qu’on fait, dans sa vie privée comme au travail. Je pense que les valeurs sont importantes, surtout dans l’approche que l’on a vis-à-vis des autres et dans tout ce qu’on fait.

SA FORCE. L’écoute. Je suis entouré de machines qui sont toutes accompagnées d’un manuel d’utilisation. Quand elles ne fonctionnent pas, on les remplace. Dans mon métier, nous mettons des systèmes en place. La plupart du temps, lorsqu’ils ne marchent pas, c’est qu’on a oublié qu’au centre de tout ça, il y a le facteur humain. C’est essentiel de comprendre l’humain pour mieux réussir. Aussi, j’ai perdu ma maman qui s’est battue contre trois cancers. Ce sont des choses de la vie qui nous forment. Ma force, c’est aussi mon vécu, mon expérience, ou, en tous cas, le fait de pouvoir m’appuyer dessus.

SA FAIBLESSE. Je suis parfois trop impatient. Quand je n’en peux plus d’attendre, je finis par faire moi-même. C’est peut-être mon côté perfectionniste, j’en suis conscient. C’était un de mes plus gros défauts sur lequel j’ai beaucoup travaillé. Aujourd’hui, je sais que la perfection n’existe pas. Je me concentre sur l’excellence. Dans notre métier, on parle d’excellence opérationnelle. C’est un vrai combat, surtout dans notre pays où on adopte trop souvent une culture de “bate baté”.

SON RÊVE. Mon rêve, dans l’absolu, c’est de semer le bonheur, de rendre les gens heureux. C’est utopique et très cliché, mais c’est ça le rêve. A Maurice, il y a un manque ambiant de sérénité. Les gens sont de plus en plus malheureux. On a perdu la notion de rêve. On baisse la tête, sans horizon. Et rêver, c’est avant tout lever la tête vers le haut. Un autre de mes rêves serait d’avoir un grand studio photo d’une taille suffisante pour y faire entrer une voiture.

SA FIERTÉ. Ma fierté c’est ma famille, mais aussi mon parcours, avec mon expérience à l’international. J’ai travaillé dans une dizaine de pays, avec différentes cultures. J’ai des contacts à travers le monde. Mener des projets dans différents pays, avec différentes personnes, différentes cultures, différentes façons de penser, c’est pour moi un succès, une fierté.

SON REGRET. L’absence de sérénité autour de nous est la cause d’une érosion de compétences. Ça c’est un regret, car je le vis tous les jours. C’est un combat au quotidien. Aujourd’hui, la plupart des gens sont désabusés. Beaucoup de mes camarades de classe sont partis à l’étranger. Le regret, c’est de constater ce manque d’envie de renforcer nos compétences, ce manque de vision.

SON DÉFI. Lorsque j’ai commencé mon premier job chez Rogers, j’avais dit à mon assureur que j’allais prendre ma retraite à 40 ans. Il m’avait répondu : “Tu es fou !” C’était mon défi, mais j’ai raté le coche, j’ai 48 ans ! Donc, maintenant, je vise les 55 ans.

SON BRAS DROIT. Je n’ai pas un bras droit, mais plusieurs. Je forme une équipe qui peut être autonome sans moi et cette équipe est composée de personnes qui sont toutes mes bras droits.

SON INSPIRATION. Mon livre de management favori est la Bible. Non pas que je sois prédicateur mais j’applique certains textes bibliques dans le milieu professionnel. Par exemple, la parabole des talents où l’on parle d’investissement s’applique à l’entreprise. Les valeurs d’entreprise et les valeurs humaines sont importantes. Je gère une compagnie à taille humaine, où nous avons la possibilité de traiter avec la personne et pas uniquement la position. Je m’inspire de ces textes pour cela.

SON MENTOR. Je n’en ai pas. J’ai eu de la chance de côtoyer beaucoup de personnes différentes, personnellement et professionnellement. J’ai des collègues qui sont devenus des amis, à Maurice, à l’étranger, dans différents milieux… Tous m’ont aidé à me forger. Quand on me demande de quoi je me souviens dans tel ou tel pays, je dis toujours que c’est avant tout les personnes. Car c’est eux qui ont fait la différence. Je me souviens, par exemple, de la gentillesse de mon collègue malawite, qui faisait tout pour que mon séjour se passe bien. Il n’avait pas beaucoup de moyens mais un sourire que je n’oublierai jamais. Au Bangladesh, mon patron était Australien, mais il habitait Singapour. Il m’avait dit une chose qui m’a marqué : “If you see that things are not being done a certain way, try to understand why it’s not being done that way first before you change it.” Tout ceci m’a façonné dans mes convictions, dans ma manière de vivre et dans mon approche du travail.

UN OBJET FÉTICHE. J’aime bien les jolis stylos. J’utilise beaucoup les carnets, ce qui est un grand paradoxe avec mon métier axé sur la technologie.

DANS DIX ANS. J’aimerais pouvoir me dire que j’ai contribué à faire la différence dans la vie de quelqu’un que j’ai côtoyé.